Jérôme par cœur, Thomas SCOTTO, illustrations de Olivier TALLEC, Actes Sud Junior, 14 €
Dès la couverture, on comprend que cet album n'est pas un album jeunesse parmi tant d'autres : Olivier TALLEC y a dessiné deux petits garçons en train de faire du vélo et surtout, qui se tiennent la main. Présentés de face, leurs regards et leurs sourires droit sur le lecteur, ils envahissent la page. Avant même de plonger dans l'histoire, on sent déjà toute la tendresse et la douceur qu'a voulu transmettre l'illustrateur de Jérôme par cœur à travers ces deux personnages.
Jérôme par cœur est un album qui pose des questions et qui cherche à bousculer les idées reçues. Le scénario qu'a imaginé Thomas SCOTTO est en même temps très simple et très complexe : l'histoire est celle de Raphaël et de Jérôme, deux personnages de 5 ou 6 ans qui se vouent une amitié sans borne et qui font montre l'un envers l'autre d'une infinie tendresse. Tout est d'ailleurs parfaitement résumé dans ces quelques mots, qui ouvrent et ponctuent l'album et qui sonnent de ce fait comme un refrain : « Raphaël aime Jérôme, je le dis. Très facile ». Facile pour lui, mais difficile à concevoir pour son père, qui incarne ici le monde des adultes et des préjugés.
Jérôme par cœur n'est pas un album qui traite de l'homosexualité, pour la simple et bonne raison qu'il n'y est jamais question de sexualité : Thomas SCOTTO et Olivier TALLEC, chacun avec ses armes propres, transcrivent là toute l'innocence et la pureté de l'enfance. Raphaël et Jérôme ne se posent pas de questions, ne se demandent pas si ce qu'ils ressentent l'un pour l'autre et bien ou mal. C'est le regard des adultes qui introduit le malaise. La preuve en est que si ces deux petits garçon était deux petites filles, cela ne susciterait probablement aucune interrogation. Mais Raphaël – c'est lui le narrateur – choisit de ne pas tenir compte de l'opinion de ses parents : il aime Jérôme, tout simplement.
La force de cet album réside dans l'alliance du texte et de l'image. Tout est raconté avec des mots d'enfant – ceux de Raphaël - et la simplicité du propos touche autant qu'elle percute. L'illustration, quand à elle, ne se contente pas d'accompagner le texte : elle prend son relai et parle autant que lui. Une écriture simple et des couleurs tendres et chaudes, qui donnent un grand coup de pieds dans les préjugés et les a priori.
Pauline