Voici enfin les résultats du concours organisé à partir des illustrations de Chris Van Allsburg...
Le choix a été difficile à faire, tant les textes sont différents de par leurs styles, et puis vous avez été nombreux à participer!
Mais nous avons du choisir... Alors voilà les lauréats!
Niveau primaire:
- l'école des Baux Sainte Croix, avec en plus un prix spécial pour Tess ARNAUD
Niveau collège:
- 1er prix pour Rachel GUILLEMINOT (dont vous pouvez lire le texte plus bas) de Pont-Audemer
- 2ème prix pour Audrey CLEMENT de Lisieux
Niveau Lycée:
- le texte écrit par Nasser Hamdi, Sébastien de Groote, Jérémy Duchesne et Julien Le Guennec de Vernon
- le texte écrit par Mélanie Robert, Anne-Sophie Lapôtre, et Aline Wilczynski de Vernon
la classe du lycée professionnel Sainte Agnès de Vernon sera également récompensée pour la remercier de sa participation et de la qualité se son travail.
Niveau adulte:
- Muriel Moujeard d'Evreux
- Annie B. de Lisieux
Les heureux gagnants dont les noms sont cités sont conviés à une remise des prix qui se déroulera à la librairie l'Oiseau Lire, le samedi 26 avril à 14h.
Nous remercions tous les participants, retenus ou non, pour votre participation, l'originalité parfois de vos productions, pour le plaisir que l'on a eu à vous lire!
Texte de mademoiselle Rachel Guilleminot, collège
Illustration choisie : la bibliothèque de M.Linden
Crépuscule
C’était l’été. Le soleil resplendissait sur la campagne. Des voitures passaient de temps à autre, brièvement, en quête de soleil et de repos. Les vacanciers s’arrêtaient parfois dans un hôtel du coin, mais ils ne restaient jamais bien longtemps, préférant pour la plupart la chaleur de la plage.
Une jeune fille, tout juste majeure, avait cependant décidé de passer ses premières vacances en tant que telles dans une chambre d’hôtes, afin de profiter de l’air de la campagne avant de repartir pour une année à Paris. Pour tout bagage, elle avait un sac à dos et un carnet à la main. Un petit garçon, blond comme les blés, la suivait d’un pas léger. Il ne portait rien : ni valise, ni même un petit sac.
Devant la réceptionniste, l’aînée demanda une chambre pour une personne. Elle prit la clef qu’on lui tendit et alla déposer ses affaires dans la chambre. Son frère la suivit, sans que l’hôtesse d’accueil ne le remarque.
Une fois la porte de la chambre refermée, le garçon demanda :
« Lindsay ?
- Ne t’inquiète pas, je n’ai pas oublié »
Lindsay ouvrit son carnet, prit un stylo et y inscrivit :
Fleury Théo
14 juillet 1994 – 5 septembre 2003
Les pages précédentes étaient toutes remplies de notes identiques à celle-ci. Lindsay remarqua quelques brins d’herbe coincés entre les pages, mais elle n’essaya pas de les enlever. Théo y jeta un rapide coup d’œil et dit :
« Ce sera bientôt terminé, pas vrai ?
- Je ne sais pas, répondit Lindsay. Et je ne peux rien y faire. Je me demande ce que je ferai quand tu ne seras plus là. Peut-être que je te rejoindrai. »
Le garçon lui jeta un œil désapprobateur, mais il ne dit rien.
« Tu sais, j’y ai beaucoup réfléchi, depuis quelques mois, continua-t-elle, et ce serait sans doute la meilleure chose à faire, pour nos parents comme pour moi. Ils pensent que je suis folle, et ils ne le supportent pas. Je ne leur ai pas parlé de toi depuis cinq ans, seulement, parfois, ils m’entendent te parler. En plus, je suis sûre que maman a déjà vu ce carnet. »
Elle l’agita sous le nez de Théo pour accompagner ses paroles.
« Tu imagines un peu le choc que ça a dû lui faire ? s’exclama-t-elle. Alors non, il faut que ça s’arrête. Si ça continue, ce sont eux qui vont devenir fous ? Je veux juste être sûre. »
Théo secoua la tête, dépassé par la décision de sa sœur et surtout par son entêtement.
« Si je meurs, je pourrai venir te voir ? Rester avec toi ? C’est sûr ?
- Oui . »
Ce n’était pas la première fois qu’ils abordaient la question. Théo rassura sa sœur, en tentant malgré tout de la dissuader de faire quelque chose d’irréversible. En vain.
L’après-midi s’écoula lentement. Lindsay s’était installée dans un champ et dessinait le paysage qui s’offrait à elle. Le regard de Théo s’en allait au loin. Lindsay savait que quand il était ainsi perdu dans ses pensées, il était inutile d’essayer de lui parler. Elle continua son dessin et attendit qu’il revînt sur terre, ce qui ne tarda pas à arriver.
« Qui t’as donné le carnet ? interrogea-t-il.
- Grand-mère. Elle m’a juste dit d’y écrire le nom de quelqu’un que j’aime. Et elle a rajouté : « Rien n’est éternel ».
Théo acquiesça, songeant que le message ne pouvait pas être plus clair. Il se demanda toutefois pourquoi sa sœur avait décidé d’écrire également sa date de naissance et de mort. Peut-être que cela lui était venu naturellement.
« Alors j’ai écrit ton nom ».
Il connaissait la suite de l’histoire ? Sans comprendre comment au premier abord, il s’était retrouvé aux côtés de sa sœur, puis, au bout de quelques heures, avait à nouveau disparu. Lindsay avait tenté le tout pour le tout et avait à nouveau écrit son nom dans le carnet. Il était revenu. Depuis, Lindsay renouvelait sans cesse l’expérience, en faisant tout son possible pour que Théo ne parte pas, même une minute. Seulement, le carnet s’abîmait. Il était de moins en moins efficace au fur et à mesure que des plantes y apparaissaient. Ça avait commencé par quelques brindilles, puis Lindsay sentait à présent que la fin du rêve était proche, mais faire face à la réalité lui était impossible.
Dans sa chambre, Lindsay passa sa chemise de nuit et se laissa lourdement tomber sur le lit. Elle éteignit sa lampe de chevet, remonta la couverture jusqu’à son menton, puis s’en débarrassa quand elle eut trop chaud. Elle ne parvint pas à s’endormir. Le carnet était posé sur le bord du lit ; elle le sentit bouger. Le rythme de son cœur s’accéléra, et quand elle prit le carnet à l’air si insignifiant dans ses mains, elle se rendit compte que celui-ci tremblait. Elle l’ouvrit. La suite lui sembla floue. L’espace d’un instant, elle crut voir des lianes, en tous cas une masse verte fondre sur elle, puis plus rien.
La seule chose dont elle était encore consciente, c’était qu’elle suffoquait. Quelque chose bloquait sa respiration. Sans doute la même chose que ce qui était sorti du carnet. Elle ne chercha pas à comprendre ce qui lui arrivait, ni même à se défendre. Elle savait que la fin arrivait, et qu’il ne valait pas la peine qu’elle tentât de l’en empêcher.
« Lindsay… »
La voix de Théo la réconforta. Puis une drôle de sensation suivit, teintée de surprise. La main de Théo, qu’elle n’avait plus sentie depuis cinq ans, lui effleura le bras. Elle comprit alors que tout allait bien se passer, et avant de sombrer dans l’inconscience, pensa de toutes ses forces :
« J’arrive, Théo. Nous serons bientôt ensemble. »