Méto, tome 1 : La Maison
Yves Grevet, Syros, 14,90 €
La Maison ? Un internat coupé du monde, sur une île volcanique, où vivent soixante-quatre garçons aux prénoms latins, répartis en quatre classes d'âges codées par des couleurs. Méto appartient au groupe des Rouges, les plus âgés. Le petit Crassus, arrivé après l'expulsion de Quintus devenu trop vieux, est confié à Méto, qui sera pendant quelques semaines son tuteur et mentor. En même temps que Crassus, le lecteur découvre les règlements innombrables qui régissent, du lever au coucher, chaque instant du quotidien de ces garçons.
Encadrés par des surveillants inflexibles (les César), menacés de châtiments corporels, ces enfants et jeunes adolescents ont pour seul exutoire l'inche, jeu collectif particulièrement violent et dangereux, apprécié pourtant de tous parce qu'il libère les tensions. Dans le cadre de leur formation, les exercices physiques occupent une place essentielle. Nul n'a conservé de souvenirs de sa vie antérieure, nul ne connaît son âge, non plus qu'il ne sait ce qu'il deviendra après avoir quitté le groupe des Rouges. Méto, lui, s'interroge : quelle est la finalité de la Maison ? qui donc la dirige ? à quoi les destine-t-on ? les soldats monstrueux qui interviennent ponctuellement sont-ils encore des êtres humains ? comment obtenir réponse à ces questions ? une révolte est-elle seulement possible ?
L'univers oppressant du roman s'appuie-t-il chez l'auteur sur des souvenirs d'internat ? On devine en tout cas que la psychologie de ses personnages et leur comportement en groupe sont nourris de son expérience d'enseignant. Évitant tout angélisme, Yves Grevet fait de l'insurrection des garçons un récit réaliste, qui n'en occulte ni les errements ni les dérives (faisant ainsi songer parfois à Sa Majesté des mouches de William Golding). Inquiet, intelligent, droit et mesuré, Méto, dont le prénom d'origine grecque tranche avec ceux des autres garçons, réussit à tempérer les débordements des leaders. Mais les représailles s'organisent et bientôt il faudra fuir. Voilà un roman passionnant, riche et bien construit, à l'écriture efficace : vivement la suite ! Thomas Savary, librairie Voyelles
Il y avait un garçon de mon âge juste au-dessus de chez nous
Tania Sollogoub, Medium, Ecole des Loisirs, 9 €
Jacques est un jeune garçon fasciné par les pays froids. Solitaire, il vit dans une famille où il est un fils unique choyé. Un jour, Anton débarque dans sa vie. Jacques trouve en lui son double et son équilibre. Hélas, au bout de deux ans, Anton part retrouver ses parents en Russie. (C'est la version officielle donnée à Jacques.) En réalité la vie en France devenait trop dangereuse pour Anton qui était sans-papiers. Quand Jacques découvre la vérité sur son ami, c'est un choc mais le départ de son ami lui laisse un terrible sentiment de manque. Par chance, comprenant l'importance de cette amitié pour son fils, la mère de Jacques décide de lui offre pour son anniversaire un voyage en Russie. Tous deux partent à la recherche de l'ami disparu dans un pays aussi vaste que déconcertant. Réussiront-ils à retrouver Anton ? Cela s'annonce très difficile car ils n'ont que très peu d'informations. Jacques découvrira alors une Russie tout autre que ce qu'il rêvait, notamment la dure réalité que peut vivre son ami.
Ce livre nous fait voyager dans un pays étonnant. La quête de Jacques et sa mère, les rencontres et situations qu'ils vivent font découvrir au lecteur différents visages de la société russe. Le thème de l'amitié et des différences culturelles est au centre du récit. L''amitié est présentée comme un idéal qui n'exclut pas pour autant les difficultés relationnelles (secrets et mensonges d'Anton). En arrière-fond, le contexte familial de Jacques donne également à réfléchir sur la complexité des sentiments qui unissent cette famille.
Christelle Rose, bibliothécaire, Bibliothèque Départementale
Sayonara Samouraï
Julia Billet, Karactères, Seuil, 8,50 €
Ismaël est un garçon enjoué et sportif. A 14 ans, il est passionné par la culture nipponne, les arts martiaux et la pensée zen. Le samouraÏ est une figure qu'il admire, et atteindre un tel niveau de sagesse est un but en soi, pour lui et ses quatre amis. Il forme avec eux une bande, un clan, dans lequel tous partagent le même engouement. Ils se promettent une amitié et une fidélité sans écart.
Peu de temps après avoir obtenu la ceinture marron de judo, Ismaël n'est plus le même. Au fil des jours il s'affaiblit, a des douleurs inexpliquées. Le diagnostic dépasse toutes les inquiétudes : il est atteint d'un cancer. Il accepte cette nouvelle comme un challenge, il va devoir affronter cet épreuve avec la force du samouraï qu'il veut devenir, entouré de ses copains Driss, Alain, Tonio et Arthur. Tout change un peu autour de lui. La soeur d'Ismaël, alliée de sang et de coeur, lui fera la plus belle fête d'anniversaire jamais imaginée. Grâce au garçon hospitalisé, Monsieur Albert le gardien du stade que les adolescents regardaient d'un oeil moqueur parviendra à surmonter sa peur d'adulte et trouvera la force et à nouveau le bonheur de sortir de chez lui.
Ponctué de petits contes zen qu'Ismaël transmet à ses amis, ce roman est admirablement scénarisé, autour de personnages-clés qui rendent hommage à la relation fragile entre l'adolescent et l'adulte, et où l'on sent la distance que parvient à prendre Ismaël avec sa maladie. Promesse tenue pour Julia Billet : ce livre, fruit d'une rencontre avec un réel samouraï est aussi une façon de le remercier pour son courage. A nous de remercier Julia Billet pour cette histoire contée avec émotion, qui en fait un roman frappant de justesse, extrêmement fort et touchant. Laure Devisme, librairie l'Oiseau lire
Opération Phénix
Franck Krebs, Gallimard, 15 €
Quatre grands adolescents « prélevés » à leur environnement, à Paris, à Londres, à Pékin, à New York, pour être enrôlés dans l'Opération Phénix. Après une intervention chirurgicale qui les dote de nanotechnologies, ils sont prêts à partir à la recherche des douze crânes de cristal qui donneront à leur détenteur une puissance à nulle autre pareille. Alan, Anna, Miguel et David ont été « prélevés » par le SPS 666 parce qu'ils ont tous les quatre un lien avec ces crânes mais ils ne sont pas les seuls sur le coup et ne sont même pas sûrs d'être dans le bon camp...Qui est le SPS 666 et quel est son rôle exactement ? Qui des Américains ou des Chinois les auront les premiers ?
Un roman efficace et prenant, construit comme une série télé avec des épisodes très courts, un personnage ou deux par chapitre et une petite illustration représentant le personnage. Tout est fait pour embarquer le lecteur et le tenir en haleine et ça marche ! Cathy, bibliothécaire, Vernon
Naïra et les cavaliers noirs
Sylvie Fournout, Chapitre, Seuil jeunesse, 9,50 €
Naïra vit dans le désert auprès de ses parents et de sa chèvre. Ceux-ci s'absentent afin de prendre possession d'un héritage auprès du fleuve. Après une tornade, elle recueille un jeune homme blessé qu'elle croit perdu. Celui-ci porte un anneau d'or. Il s'appelle Souleymane et c'est le fils du roi renversé par son frère. Ce jeune homme est recherché par les Cavaliers noirs à la solde du frère du roi.. Lorsque ceux-ci viennent la visiter, elle leur ment. De nouveau, ils reviennent. Le jeune homme qu'elle a accueilli va se cacher. Mais les terribles cavaliers remarquent un tissu qui n'a pas fini de brûler dans le feu. Naïra leur échappe de peu en se cachant dans une de ses cachettes secrètes situées près du puits. De rage, les cavaliers noirs détruisent tout ce qu'il y a dans la maison. Naïra et le jeune homme sont obligés de fuir à travers le désert pour regagner le fleuve. De nombreuses aventures les attendent.
Roman d'aventures passionnant avec de nombreux rebondissement, des personnages bien campés qui nous restitue avec brio l'ambiance du désert, le silence, les odeurs et les couleurs. Amour et amitié sont également au rendez-vous. Anne-Marie Haloche, Bibliothécaire
Les signatures du hasard
Hubert Ben Kemoun, Karactère(s), Seuil, 8,50 €
Annabelle a 15 ans, c'est une jeune fille en mal d'amoureux qui croit beaucoup aux signes du hasard...
Et la journée n'a pas très bien commencé pour elle : lors d'une séance au cinéma, Francis l'a rejetée pour se jeter dans les bras de son amie Colline. Attristée par cette situation, Annabelle quitte le cinéma à la moitié du film et erre dans les rues de Nantes, l'âme en peine. Son regard est bientôt attiré par Cybèle, joli mannequin de rue, qui se produit déguisée en sirène dans une des fontaines de la ville. Voyant dans la sonorité de leurs 2 prénoms un signe positif du destin et pensant avoir trouvé une grande sœur, Annabelle décide d'attendre la fin de son show et de la suivre... Mais Cybèle n'a pas que des amis bien intentionnés dans son entourage et ce qui était jusqu'à maintenant une mauvaise journée devient la plus horrible des journées pour les 2 jeunes filles. Un récit palpitant construit en 15 chapitres, chaque chapitre étant narré par un des 5 principaux protagonistes de l'histoire. Un roman au style direct, au suspens bien mené et mêlant habilement l'alternance des points de vue. Bravo ! Alexandra, bibliothécaire
Le violoncelle poilu
Hervé Mestron, Tempo, Syros, 5,90 €
Dans ce court recueil, trois nouvelles sont consacrées à la première guerre mondiale. C'est d'abord à travers le regard d'un violoncelle que nous découvrons le front. Il accompagne Maurice, musicien dans la vie civile, et partage avec lui ses souffrances comme un ami fidèle. Rapidement, la belle caisse de bois verni se dégrade, souffre de la lourde musique des bombardements et de l'humiliation des réparations de fortune, mais garde à cœur de réconforter le soldat pendant les veillées. Loin des concerts raffinés qu'il a connus, l'instrument prend alors plus que jamais conscience que son âme est liée à celle de celui qui joue.
Dans la deuxième nouvelle, Bruno, jeune garçon au chevet de son grand-père malade, découvre en transcrivant ses souvenirs, que celui-ci a été un petit « Boche », haï par un village entier pour avoir été le fruit d'un amour sincère entre une Française et un soldat ennemi. Le vieil homme avoue pourquoi, rejeté, privé d'une relation aimante avec son père, il s'est montré distant et maladroit avec son propre fils. Bruno comprend alors comment la violence de la guerre peut briser les relations affectives sur plusieurs générations. Enfin, un vieux fusil fatigué, exposé dans la vitrine d'un musée, livre non sans humour sa gêne d'être scruté quotidiennement comme un tueur, et sa peur d'être sorti à l'occasion d'une reconstitution de tir, à côté d'armes contemporaines qui pourraient être ses petites filles...
Plus que de fournir des récits circonstanciés sur 1914-1918, ce recueil se propose d'explorer les souffrances universelles, tant physiques que psychologiques, qui marquent tout conflit armé. Si l'objet occupe dans le texte une place si importante, c'est que son regard, forcément pratique, mais non dénué de sensibilité, invite à se demander en quoi consiste finalement le plus absurde : donner la parole à l'inanimé, ou faire taire l'humain par la violence? La prose, très accessible, permet divers degrés de lecture et fait tour à tour sourire ou s'émouvoir. Ces histoires ont été créées en 2007 à l'occasion d'une résidence d'auteur à l'Historial de la Grande Guerre dans la Somme. Magali Lemaire, bibliothécaire
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